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   spécial Cannes
 
US ET COSTUMES

Pour son édition 2000, Cannes s'offre un flashback historico-cinématographique où l'Histoire de France, de Navarre mais aussi du Portugal, du Japon, de Chine vont nous renvoyer à nos manuels, à défaut de la littérature typiquement best-seller et adulée par Hollywood.
Sur la Croisette, on aime la poudre (celle pour se maquiller), les dorures (et non pas les dorés sur la plage), et les costumes (smocking et robes de soirée obligatoires). Les films ne reflètent que l'aspect nanti et élitiste de ce Festival qui pourrait se comparer à la Cour de Versailles.
Nous sommes dans un monde de privilèges, avec ses castes, ses valets et ses histoires de (co)culs. Vatel n'est que le énième film narrant l'aristocratie à travers le celluloïd dream. Ridicule, Le Barbier de Sibérie, Fort Saganne... l'ouverture du festival se fait en grande pompe, avec galerie des glaces pour mirer les célébrités invitées. Quel paradoxe l'année où le tout puissant Besson, échappé de son élément, préside le jury du Festival. Lui, tourné vers le futur, se voit plonger dans un passé un peu naphtalineux. Loin de Leeloo. Mission to Mars, aussi médiocre soit-il, aurait été une meilleure rampe de lancement, s'il n'était pas sorti aux USA en mars.
Tel la principauté de Monaco, le Festival s'accroche à son rocher (avec nouveau château en sus), et la passation de pouvoir à l'héritier souffre de l'attachement à ce même pouvoir... Le droit divin est difficile à remettre en question. Reconnaissons-le, la sélection officielle a de l'Allure (même si ce n'est pas un parfum L'Oréal) et Cannes revendique sa position de leader en défendant son bunker. Terre de découvertes, de passions, d'odeur de souffre et de goût des autres, la Croisette accueille quelques un des plus grands rêveurs, créateurs, "imagineurs" de notre temps. ils renvoient à nos yeux, des métaphores, des histoires d'un autre siècle, qui ne sont que l'écho - le reflet? - de notre ère en mutation.

 
 

Vatel, distraction gustative et un peu délicieuse, n'est que l'apéritif d'un menu chargé en plats de résistances, excitant et a priori nous extasiant. Vatel ce n'est jamais que le retour de Joffé (Mission accomplie), le doublé de Uma Thurman (en compétition avec Ivory, et donc évincée du jury), et le sacre de Depardieu, Prix d'Interprétation pour Cyrano en 90 (le début de la fin diraient certains). Depardieu, Institut de goûter.
Depardieu n'a certes plus l'envie, l'énergie d'avant. Il est devenu cuisinier mais il a maigri. Désormais, il tourne pour la télé dans des fresques historico-littéraire. Il est devenu banal et star quotidienne, homme sans défi, et presque blasé. Où est son ambition? Pourquoi la nouvelle génération de cinéastes l'ignore-t-elle (alors qu'il a été le porte-drapeaux du cinéma dans sa pluralité)? Depardieu au crépuscule, triste ou belle oraison funèbre en guise d'ouverture du dernier Festival de Cannes du siècle? Tournons la page. Le Roi Soleil passe le relais aux esprits du siècle des Lumière et aux révolutionnaires... Pas besoin de plats, ou de films, trop riches. Qu'importe le vin, pourvu qu'on est l'ivresse. Celle du désir tout d'abord. Et celle du plaisir ensuite. Après tout, c'est la curiosité qui éveillera nos papilles et alertera nos sens. Une ouverture d'esprit essentielle, tant en gastronomie qu'en cinéma. Laissons-nous guider par ce maître d'hôtel qui a l'air de s'y connaître en 7ème Art... Ouvrons grand les yeux!

 
 
Jeu de pisteÉet de couleurs

Soit un journaliste ébloui, encore incrédule de faire partie des quelque 3000 membres de l’illustre confrérie, tous munis du précieux sésame, en route vers un petit morceau de gloire. Quelle n’est pas sa déconvenue, une fois les pieds posés dans le bunker surprotégé, de découvrir qu’entrer n’est rienÉà défaut d’être admis.

Car une stricte hiérarchie règne en maître aux abords des salles où l’essentiel se passe, réglée par un système aussi enfantin que primaire : les couleurs ! Accréditation bleue ? Mauvaise pioche : direction le balcon dans les salles de cinéma, retour à la case départ pour les conférences de presse. S’il reste de la place, peut-êtreÉRose ? C’est mieux, l’attente est de courte durée. Rose + une pastille jaune ? Sésame ouvre-toi, au Festival de Cannes tu es roi.

Moins toutefois que les invités, pour qui le Palais se transforme aujourd’hui en royale demeure, parée des plus beaux atours du film du soir, «Vatel ». Plus de fête sur les plages après minuit et demie ? Qu’à cela ne tienne, un cocktail fera très bien l’affaire, et tant pis pour les oiseaux diurnes qui voient « leur » palais transformé en labyrinthe inextricable.

Tant pis pour notre journaliste innocent, qui a déjà 3 bons kilomètres dans les pattes, toujours rien dans le ventre et une seule idée en tête : trouver la salle des conférences de presse où se réunit le Jury du festival. Passés six couloirs et une dizaine de providentiels hommes bleus (guides autant que gardes), le voilà sur place, à attendre l’interminable appel des roses pastillés, roses, etcÉInutile d’espérer trouver une place assise : à l’heure où il entre, c’est par terre qu’il guettera les 10 juges

 
 
 

Les voici justement qui arrivent: Kristin Scott Thomas, radieuse, ouvre le bal. Besson ne tarde pas à suivre, visiblement ravi, détendu, comme on ne l’avait plus vu depuis longtemps. Il n’y a guère que Jeremy Irons à rester de marbre, terriblement séduisant, mais terriblement glacial.

A retenir, après une demie-heure de questions inégales autant qu’attendues : Joanathan Demme fut révélé par Roger Corman ; « on prend l’habitude d’être critiqué » (Luc Besson) ; ce sont les films d’Ozu qui ont donné envie à Nicole Garcia de faire du cinéma ; cette dernière est autant excitée qu’angoissée par l’énorme responsabilité qu’implique sa position ; à la question «voulez-vous être président du Festival de Cannes », Luc Besson a mis deux secondes à dire oui, «je ne pense pas qu’on puisse refuser » ; Jeremy Irons s’ennuie facilement en tant que spectateur (!) ; Luc Besson se fiche que les fêtes s’arrêtent tôt ; Aitana Sanchez-Gijon regrette que les films espagnols soient de moins en moins nombreux à être sélectionnés ; « ce qu’il y a de mieux dans une cuisine, c’est la salle à manger » (Luc Besson) et Jonathan Demme est «so excited » !

Prometteur pour notre journaliste, vu pour la dernière fois au détour d’un couloir, simplement en quêteÉ..d’une salle de cinéma !!

 
 
 
 

 
Le dessin de JAPPI
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