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The General (The General - The General)
Sélection officielle - Séances spéciales
USA / sortie le 15.09.04
LA BATAILLE DU RAIL
Autant le signaler : le film vu est une copie restaurée (admirable travail) avec une musique composée pour l'occasion par Joe Hisaishi, jouée en "live, avec un Orchestre symphonique. Un ciné-concert exceptionnel.
"- Si vous perdez cette Guerre, ne venez pas vous plaindre!"
Keaton, aux côtés de Chaplin, fut l'un des grands fondateurs du cinéma. Sa créativité comique, son personnage lunaire et triste, maladroit et faible, forment les origines du cinéma de divertissement. Un décalage permanent entre les actes et le gag. L'intention est sérieuse, l'effet est catastrophique, et donc drôle. Muet, nous en sommes encore au temps du cinéma primitif. Avec cartons rédigés et expressions faciales.
Mais cela va bien au-delà. Car ce serait oublié ce qui fait la qualité et l'universalité de ce vieux film. Sa différence avec Chaplin tient à sa manière de faire du cinéma. L'un faisait des comédies sociales. Keaton lui est un romanesque. Ici les ponts s'écroulent sous le poids des locomotives (on pense au Pont de la Rivière Kwaï) et des dizaines de figurants forment des colonnes de soldats. Sensible et pacifiste, amoureux et travailleur, le personnage de Keaton a les caractéristiques d'un sudiste (douceur de vivre) et du nordiste (passionné de boulot). Evidemment, parce qu'il y a cette pincée de romantisme et ce désir de séduction, il se mettra du côté des Sudistes : les perdants n'ont jamais été aussi convoités par Hollywood que ces Sudistes.
Après il y a la magie. Chorégraphe des cascades, il est le prince du mouvement. Le film est dédié au cinéma : à l'image qui bouge. Tel un danseur, il étudie chacun de ses gestes et les rend séduisants ou drôles. Dans cet immense branum, il utilise le cirque comme art pour faire rire : il se casse souvent la gueule. Mais il utilise aussi les lois de la physique pour défier la réalité. Ainsi un canon ou un bout de bois deviennent des menaces, naturellement, à part entière.
Les comédiens n'ont pas besoin d'en faire plus que Keaton, lui-même minimaliste. Mais tout fonctionne, encore maintement. Son jeu n'a pas vieilli. Tel un clown.
The General ne manque pas d'ampleur ni de rebondissements. De quoi en faire un film dynamique. L'insouciance du personnage, les gags inventifs et la beauté des paysages font de ce rail-movie un grand film. Actuel. Universel. Seul le rôle féminin peut faire grincer des dents : sac à patate maltraité, l'amour de sa vie, pas très mince, très idiote, bonne à faire le ménage, se fait piétiner, mouiller, battre... Gloups!
Ce "loco-motion-picture" nous transporte avec joie, tirant profit des erreurs de tous (qui créent les malheurs des uns et le bonheur du spectateur). La réalisation s'est donnée les moyens. Certains cinéastes devraient revoir ce classique, tant sa simplicité est d'une efficacité redoutable.
Et puis on appréciera ce Keton, mal à l'aise avec ses outils (armes, épées, ...), timide devant les filles, giclant un peu n'importe où n'importe comment, et finalement très doué pour piloter sa grosse locomotive en solo.
Concluons avec la partition musicale d'Hisaishi : magnifique, entêtante, idoine et finalement parfaite. Elle colle au film, à l'image et transcende le spectacle. Ce n'est plus simplement une grande comédie aventureuse du muet, c'est aussi une oeuvre qui traverse le temps.
vincy
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