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Cold War ( Zimna Wojna)
Sélection officielle - Compétition
/ sortie le 31.10.2018
LES AMANTS IRREGULIERS
« Moi, je ne serais pas partie sans toi. »
De quelle guerre froide parle-t-on ? De celle qui divise le monde en deux au moment où se passe le film (entre 1949 et 1964) ou de celle que se mène, sous prétexte d’amour fou, les deux protagonistes ?
Tout avait bien commencé, pourtant. Un étrange trio va de village en village pour recueillir les chants traditionnels auprès du « peuple », le héros du nouveau régime de Varsovie. Dans un noir et blanc parfait, dans de très beaux cadres rapprochés (au format carré), Pawel Pawlikowski filme les visages des chanteurs et des musiciens. Les mélodies sont mélancoliques et profondes, semblant donner un aperçu de l’énigmatique (et tarte à la crème) « âme slave ». La première partie du film est ainsi emplie de ces hommages au folklore polonais, malheureusement de moins en moins sincères au fur et à mesure que passe le temps. Le parti communiste est en effet avide de récupérer ces joyaux nationaux pour les transformer en hymne à sa propre gloire, ou à celle de ses alliés. La propagande ne connaît ni limites, ni mesure.
Mais là n’est pas le vrai sujet du film, c’est même plutôt un prétexte. Le récit quitte alors la Pologne pour Berlin, puis Paris, et se détache de l’intrigue artistique pour littéralement s’enliser dans une histoire d’amour vue cent fois, celle d’une jeune femme dont on se demandera en permanence si elle est sincère et d’un homme qui court à sa propre perte le sourire aux lèvres. Du point de vue du spectateur, c’est un peu comme si ces deux-là s’échinaient à inventer des problèmes qui n’existent pas, dans le but avoué de se déchirer le plus possible.
Toute la contradiction de Cold war réside dans cet antagonisme : Pawel Pawlikowski veut nous faire croire à une folle histoire d’amour et de passion, de celles qui renversent tout sur leur passage (et que le cinéma a tant de fois dépeintes), et ne nous la rend pourtant jamais tangibles. Trop d’ellipses ? Trop de non-dits ? On a l’impression que les deux amants ne se voient jamais, n’ont rien en commun et s’insupportent l’un l’autre. Difficile, après ça, de frémir devant leurs atermoiements, ou de partager leur détresse. D’autant que le chapitre qui les réunit à Paris est raté (semblant copier laborieusement tous les films du même acabit passés avant lui) et que le rebondissement qui suit est limite risible.
Reste que Pawel Pawlikowski est un metteur en scène de talent, qui offre à plusieurs reprises des plans d’une beauté saisissante. L’un d’entre eux est tout simple : une camionnette filmée en plan large dans un paysage tout blanc, de neige et de brouillard. La lumière, le cadre, l’ambiance à l’écran : tout est absolument parfait et admirable. Dans le récit pourtant, cette scène ne raconte rien, elle est maîtrisée et plaisante, mais purement anecdotique. Un peu à l’image du film lui-même qui ne nous dit rien de la guerre froide ou de l’amour, ni même du cinéma.
MpM
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