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Cemetery of Splendour (Rak ti Khon Kaen)
Certain Regard
/ sortie le 02.09.2015
CELUI QUI SE SOUVIENT DE SES VIES INTERIEURES
"Tu as raison. C’est un bon endroit pour dormir."
On a l’habitude d’être dérout� par les films d’Apichatpong Weerasethakul. Mieux, on aime flotter dans son cinéma sensoriel sans avoir forcément besoin d’analyser et comprendre le moindre plan. Ce n’est de toute façon qu’avec ce lâcher-prise presque impérieux que l’on peut se laisser porter par les sensations, les impressions et les images qui président � cette expérience singulière et complexe.
Avec ce nouvel opus, on pourrait être dans un rêve éveill�, ou au contraire un songe ultra-réaliste. Quelque part entre les deux, Cemetery of splendor place le spectateur dans un état de somnambulisme hypnotique qui le fait passer par tous les états émotionnels connus. Il croise, comme autant de fantômes, des soldats endormis, une femme dévouée, des enfants qui jouent au football, une jeune medium, des princesses mortes il y a des milliers d’années� Combinant (comme toujours) éléments mystiques et réalit� triviale, le récit ressemble � une errance qui serait le fruit du hasard. Comme si chaque spectateur avait le pouvoir d’imprimer la pellicule avec des images particulières qui ne parleraient qu’à lui.
Le résultat est une succession d’impressions flottantes, au sens le plus littéral du terme, doublée d’une splendeur visuelle. La nouvelle obsession du réalisateur pour les éclairages au néon (comme en écho � la marque de fabrique de Wong Kar-wai, autre cinéaste des impressions flottantes) donne � ses plans une beaut� � couper le souffle. Il y a notamment un fondu enchaîn� vertigineux entre un escalator de centre commercial et la chambre des malades baignée par la lumière changeante de lampes phosphorescentes. Est-ce l’effet de cette luminothérapie qui traverse l’écran ? Elle semble distiller par hypnose toute une palette de sensations ténues qui viennent contaminer le spectateur d’une mélancolie insondable. Peut-être parce qu’il soupçonne un monde parallèle � portée de main mais inaccessible, dont il n’est autoris� qu’à découvrir des bribes.
Ainsi l’autre séquence hallucinée du film, celle o� un palais somptueux surgit dans la forêt par la simple magie des mots et de la suggestion. Dans un bruissement de feuilles mortes et de sons "naturels" directs apparaît un royaume de marbre rose et de jade de Birmanie, univers oubli� des vivants et des morts et seulement occupés par les êtres qui ne sont ni l’un ni l’autre. Pas d’effets spectaculaires, bien sûr, mais bien la seule force d’évocation du cinéma pour recréer cet au-del� mystérieux et impalpable, inquiétant et fascinant � la fois.
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Car entre les lignes, Cemetery of splendor laisse aussi entrevoir un propos plus politique induit par la position critique du cinéaste face � la junte militaire au pouvoir dans son pays. Ainsi, l’image des rois morts qui continuent le combat au détriment des soldats vivants peut être interprétée comme l’impossibilit� pour la Thaïlande de se défaire de son pass� historique constitu� de multiples coups d’état dont les effets se font sentir jusqu’à aujourd’hui. On peut aussi voir dans ces soldats "vampirisés" le peuple réduit � la passivit� par des lois oppressives, et dont on pompe allégrement l’énergie vitale. Par ailleurs, un peuple "endormi" ne peut guère se rebeller contre quiconque et constitue � coup sûr une "armée" passive et obéissante pour poursuivre des guerres millénaires absurdes.
Peut-être est-ce � cause de ces préoccupations très concrètes que le film s’égare moins que d’habitude dans des chemins de traverses sensuels, voire érotiques. Malgr� tout, on retrouve � chaque plan ce que l’on a tant aim� dans les autres films du cinéaste, et ce serait aller trop loin que de faire de Cemetery of splendor une œuvre militante au sens o� on l’entend en général. Procédant de la même manière que pour tous les ingrédients qui composent son cinéma, Apichatpong Weerasethakul pose ici et l� des bribes, des éclats, des signes subliminaux, et laisse le spectateur reconnaître et cueillir ce que bon lui semble. Alors, comme dans tout cimetière, la beaut� côtoie la pourriture, l’humanit� se dérobe et s’impose, et la vie répond d’égale � égale � la mort.
MpM
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