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Xenia
Certain Regard
/ sortie le 18.06.2014
AUBE (PAS SI) DORÉE
"- On n’a pas des têtes d’Albanais !
- Toi, t’as une tête de pédé, c’est pire."
Bienvenue en Grèce, ses plages de sable fin, son héritage antique et ses groupuscules néo-fascistes qui traquent sans relâche immigrés et homosexuels. Dans un contexte social lourd (la crise est passée par là, en plus du parti d’extrême droite Aube dorée), Panos H. Koutras raconte le voyage initiatique foutraque, outré et joyeux de deux frères en quête de nationalité plus que d’identité. Car si Odysseas, le frère aîné trop sage, se cherche encore un peu, le cadet, Dany, n’a besoin de rien pour savoir qui il est. Avec son look improbable (longue mèche blond platine, mini-short, collier à clous) et sa pugnacité désarmante, l’adolescent assume parfaitement et son homosexualité et le but qu’il s’est fixé : retrouver son père (grec) pour lui extorquer une reconnaissance en paternité ou au moins de l’argent.
Mi-sérieux (dans sa dénonciation d’un système, basé sur le strict droit du sang, qui crée une génération d’apatrides), mi-ironique (dans le regard qu’il porte sur ses personnages), le film fait le grand écart entre l'indispensable propos politique, la comédie adolescente et un kitsch assumé. A grands renforts de lapins géants, de chansons italiennes sirupeuses et de rebondissements improbables, il combat ainsi toutes les formes d’intolérance et substitue le conte (gonflé et hilarant) aux réalités cruelles d’une époque plutôt hostile à l’égard de tout ce qui ne rentre pas dans le rang.
Bien sûr, Panos H. Koutras (le réalisateur de l’inénarrable Attaque de la moussaka géante, il faut le rappeler) n’échappe pas à la tentation du drama, avec des péripéties inutiles et des situations outrées. Mais à l’image de son personnage, il assume ses excès : son goût pour la musique italienne des années 70 (la chanteuse Patty Pravo est la bonne fée du film), son recours au surnaturel pour faire tomber les tensions, et surtout le joyeux mélange des genres qui donne à Xenia ce ton si singulier, entre "Odyssée" moderne et quête de gloire un peu toc.
Ainsi, au-delà de son originalité et de son humour, le film brille indéniablement par son actualité et son universalité. Comme un rappel de ce qui arrive lorsqu’une société cède aux sirènes de la haine, de la peur et du repli sur soi. Dans une Europe où l'extrême-droite n'en finit plus de gagner du terrain, et où les discours "décomplexés" sur l'immigration, l'homosexualité ou l'égalité hommes-femmes pullulent, cela devrait tout simplement être reconnu d'utilité publique.
MpM
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