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My Sweet Pepper Land

Certain Regard
Irak / sortie le 09.04.2014


LA BELLE, LA BRUTE ET LES TRUANDS





Une quête de justice et de libert� sous fond de western en Kurdistan : My Sweet Pepper Land séduit par son originalit� et son humour.

Un flic kurde (Korkmaz Arslan), qui fuit les rendez-vous arrangés par sa mère en vue de se marier, débarque dans un village perdu au carrefour de l'Iran, l'Irak et la Turquie � dos de cheval. Notre héros est nomm� shérif et doit dicter sa loi dans un village dirig� par un caïd complètement barr� et franchement anti-féministe. D'ailleurs le tiers des hommes du village - qui obéissent au doigt et � l’œil de ce truand - sont aussi macho, misogyne et névros� que lui! Forcément, lorsque une institutrice (Golshifteh Farahani, toujours aussi belle) débarque dans ce monde d'homme, c'est un affront � leur virilit� (qui ici rime avec stupidit�). Ainsi, la jolie institutrice et le héros des temps modernes, deux personnages que tout oppose, vont s'entraider dans un monde o� on ne veut pas d'eux, quitte � subir les menaces et rumeurs des ennemis.

Véritablement western exotique, le film annonce la couleur dès la première scène, dotée d'un humour typiquement absurde de cette culture moyen-orientale : le spectateur est confront� � la bêtise judiciaire d'une bande de flic qui met toute une matinée � pendre un condamn�. L'image du western, en tant que genre, se profile déj� � l'horizon et ne va qu'accroître au fil du récit � travers son scénario et de par ses images. Notamment, grâce � ce bon shérif qui manipule les armes aussi bien qu'un cow-boy du Far West. Un cow-boy qui n'est ni traditionnel, ni macho, ni corrompu et qui, comme tout cow-boy qui se respecte, porte un chapeau, tente de faire régner l'ordre et la justice et regarde ses ennemis avec provocation � la manière des acteurs américains des années 50-60. Il ne manque plus que la bande son de l'œuvre de Sergio Leone et on croirait voir un Clint Eastwood. Dans ce monde de brutes et de truands, il fallait une belle. Mais pas une simple potiche en robe qui joue de ses cils et de ses charmes. Les temps ont chang�. Il fallait une héroïne, une combattante. L'éblouissante Goldshifteh Farahani incarne parfaitement cette femme affranchie, qui bouscule les préjugés et les convenances.

Après avoir demand� la permission � ses parents et ses neuf frères, l'institutrice qu'elle interprète quitte sa ville natale pour se rendre dans ce village maudit. Elle veut enseigner, coûte que coûte. Même s'il n'est pas bon d'être une femme seule aux yeux de la tradition et encore moins d'être hébergée par le shérif, célibataire, pendant la nuit. Considérée comme une prostituée, la voil� menacée, insultée et poussée � bout par les truands du village. Mais cette insoumise n'abandonne pas. Golshifteh incarne un personnage féminin qui s'émancipe grâce � sa force, son courage, son intelligence et � sa soif de justice et de libert�. Un rôle qui lui colle � la peau et lui sied � merveille. Et qui donne tout le sens du film. Elle est la pincée de poivre qui va faire éternuer les plus rudes.

Révolutionnaire, drôle et captivant, le film d'Hiner Saleem (Si tu meurs, je te tue, Après la chute) signe ici un petit joyau cinématographique. Son Kurdistan a des airs de Grand Ouest américain o� tout reste � conquérir, et avant tout le droit � la connaissance et l'égalit� hommes-femmes. La fin sera énigmatique : dans ce brouillard, quel avenir se dessinera? Le discours qui se veut engag� trouve l� sa limite. Dans un Western, la morale est frontale. Ici, Saleem préfère la laisser flotter, hésitant � nous offrir une conclusion optimiste, doutant finalement de la force de son message. Comme si, la réalit� le rattrapant, il prenait conscience qu'il s'agissait d'une fable plutôt que d'un réquisitoire.

cynthia



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