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Confession d’un enfant du siècle (Confession of a Child of the Century)
Certain Regard
France / sortie le 29.08.2012
JE SUIS LIBERTIN(E)S
Je ne peux plus l’aimer, je ne peux pas en aimer une autre, je ne peux pas vivre sans aimer
Le célèbre roman de Alfred Musset "Confession d’un enfant du siècle" voulait décrire en plusieurs centaines de pages le mal du 19ème siècle à travers les aventures sentimentales d'Octave qui va connaître un apprentissage désenchanté de l’amour… Ce pavé du romantisme contrarié méritait bien une adaptation au cinéma, même si il est curieux que ce texte si français soit traduit dans un film en langue anglaise. La réalisatrice Sylvie Verheyde a opté pour une version internationale dans la langue de Shakespeare, ce qui est compréhensible aussi bien d’un point de vue économique qu'artistique ; sur l’affiche le casting Pete Doherty et Charlotte Gainsbourg semble idéal. Cependant force est de reconnaître que le souffle du roman ne se retrouve pas à l’écran…
Le roman voulait faire transparaître les turpitudes d’une génération tentée par la décadence sans laisser son empreinte dans la marche de l’Histoire : en 1830 c’est l’époque de la Restauration après la Révolution et après l’empire de Napoléon, une période où les jeunes gens exaltés ne savent pas quoi accomplir. Dans le film on y entend d’ailleurs ce constat que la liberté mène à l’anarchie qui va mener à la tyrannie qui mènera à la liberté… Le film se déroulant dans un univers anglo-saxon presque tout contexte historique est évité, le récit se concentre surtout sur les atermoiements du personnage de Octave.
Le roman décrivait également de façon très minutieuse les tourments de l’âme de ce jeune homme qui s’étourdit dans la débauche mais qui aspire à l’Amour. Le film est raconté à la première personne avec la voix-off de Octave, cette facilité pour y introduire des phrases très littéraires du roman est comme souvent pernicieuse. Cette voix-off beaucoup trop présente laisse l’impression qu’on nous commente les images que l’on voit. Effet pervers puisque l'on ressent des longueurs dans ce film de 2 heures. Pete Doherty y promène en redingote et chapeau sa nonchalance de dandy mais l’habit ici ne fait le moine : si au début il est crédible en dépressif romantique, on se rend vite compte qu’il n’est pas assez bon comédien pour réussir à nous faire croire à sa soif d’Amour absolu. Charlotte Gainsbourg est comme à son habitude égale, sa réserve naturelle convient bien à la dame corsetée dans les conventions et elle est surprenante quand elle se laisse aller à la spontanéité. Les émotions intériorisées du personnage d'Octave sont tellement exprimées en voix-off que la séquence-clé du film semble ratée : quand Octave déclare sa flamme à Madame de Pierson de telle manière que celle-ci ne peut plus résister. Après ce moment on ne se fait plus d’illusion sur la faiblesse de Pete Doherty à être expressif, et le reste du film en pâtit.
On reconnaît à la réalisatrice Sylvie Verheyde une mise en scène en nuances qui dépasse la transposition trop académique sans aller vers la transformation trop moderne, cependant un certain ennui fini tout de même par s’installer. Confession d’un enfant du siècle souffre beaucoup de la comparaison avec les autres films romantico-littéraires qui ont eu les honneurs de Cannes : Tess de Roman Polanski est définitivement un puissant chef d’œuvre, et Bright star malgré la poésie ampoulée de Keats était autrement plus émouvant. C’est regrettable que Sylvie Verheyde, qui avait su si bien donner vie à des personnages d’une autre époque dans son film précédent Stella, semble juste nous montrer des illustrations de personnages désincarnés. Dans le roman c’était Alfred Musset lui-même qui s’interrogeait sur la nature de l’Amour, avec son film la réalisatrice nous en fait une lecture en images sans audace.
Kristofy
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