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Mother (Madeo)
Certain Regard
Corée du Sud / sortie le 27.01.2010
MERE ET FILS
"Que peut-elle te trouver, ta mère ?"
En 2006, Bong Joon-ho réinventait le film de monstre avec The Host, tragi-comédie autour d’une famille de bras cassés confrontés � une créature vorace et quasi indestructible. Avec Mother, il s’attaque � un autre genre, le polar, tout en lui conservant une forte dimension familiale. L’héroïne, ici, est en effet (comme l’indique le titre) une mère enquêtant sur le meurtre dont est accus� son fils. En filigrane de l’intrigue policière, bien réelle, se dessine ainsi le portrait de cette femme mi-dévouée, mi-monstrueuse qui, aveuglée par son amour maternel, est prête � tout pour prouver l’innocence de son enfant.
Tout l’intérêt du film réside bien évidemment dans cette ambiguït� du personnage qui sous ses dehors frêles et timorés (l’anti-héros de polar, en somme) cache une détermination et une violence de plus en plus inquiétantes. Telle une lionne, elle devient enragée lorsque l’on touche � ses petits, et c’est cet instinct presque sauvage qu’observe le réalisateur, décortiquant les mécanismes qui conduisent cette femme simple et honnête � braver tous les dangers, voire tous les interdits, pour sauver son enfant.
D’o�, peut-être, cette impression que par moments la partie purement "polar" du film, sans être réellement négligée, s’essouffle et passe au second plan. Comme si certains de ses rebondissements servaient plus le portrait psychologique du personnage principal que l’intrigue elle-même. Pourtant, dans ses séquences virtuoses, l’enquête parvient � prendre le dessus et tenir le spectateur en haleine. On retiendra notamment une étonnante séance de torture en haut d’un manège, et une séquence anxiogène magistrale vécue depuis un placard.
Largement moins foutraque et déjant� que The host, Mother gagne en cohérence et en tenue ce qu’il perd en fantaisie. Par contre, côt� noirceur, il ne lâche rien, son constat restant extrêmement critique envers une sociét� o� les riches s’en sortent toujours mieux que les pauvres, o� les plus faibles sont la proie des plus forts et o� la violence, endémique, demeure le mode de communication le plus efficace. Ce cynisme teint� de pessimisme est d’ailleurs une constante dans les films coréens découverts ces derniers mois, de Breathless de Yang Ik-June (découvert au festival de Paris) � Bandhobi de Shin Dong-il (Montgolfière d’Or � Nantes en novembre 2009). La force de Bong Joon-ho est d’éviter le film � thèse et de dissimuler son observation sans concession de la sociét� coréenne dans un récit qui privilégie largement le plaisir de spectateur (quitte � écorner la morale). Ce-faisant, il revient � l’essence du film noir originel, et écrit � sa manière une nouvelle page du néo-polar � la sauce asiatique.
MpM
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