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Production : Prince Films, Pyramide Productions Réalisation : Tony Gatlif Scénario : Tony Gatlif Montage : Monique Dartonne Photo : Céline Bozon Décors : Brigitte Brassart Distribution : Pyramide Son : Philippe Welsh Musique : Tony Gatlif, Delphine Mantouilet Costumes: Rose-Marie Melka Durée : 143 mn
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Transylvania
Sélection officielle - Fermeture
France
Honneurs à Tony Gatlif dont ce dernier film aura fait la clôture du 59è Festival de Cannes. En 2004, le cinéaste recevait le Prix de la mise en scène pour Exils, onze années après Latcho Drom (Bonne route) présenté en sélection Un certain regard 1993.
Un road-movie passions et musique avec Asia Argento, Amira Casar et Birol Unel au fin fond de la Transylvanie… Nous l’aurons compris : de cette histoire d’amour à corps perdu à l’errance en territoires glaciaux, qu’ils soient naturels ou industriels - vestiges de l’ère stalinienne -, Transylvania ne parle que d’absolu. Une nouvelle épopée sur le métissage et la condition tzigane, thèmes chers au réalisateur. On se souvient naturellement de Gadjo Dilo qui en 1998 nous portait déjà en Roumanie.
Genèse de cette nouvelle aventure : réaliser un film sur « une femme qui part au bout du monde pour retrouver l’homme qu’elle aime », dixit Tony Gatlif. Il n’en fallut pas davantage. "Au départ, je souhaitais réaliser un film dont l'action se déroulait au Mexique, car là-bas il y a des Gitans qu'on appelle ‘Hongrois’ », confiait Gatlif le 28 mai 2006 en conférence de presse cannoise. « Ces derniers ont quitté la Transylvanie il y a deux siècles pour se rendre aux Etats-Unis, mais en cours de route ils se sont égarés et se sont retrouvés au Mexique. Ce peuple représente le symbole des nomades. Mais le fait qu'ils parlent l'Espagnol, ça se rapprochait trop de mon dernier film Exils ».
Le cap fut ainsi et naturellement mis sur cette terre tant chérie par le cinéaste : un « lieu mystérieux, selon ses propres confidences : la Transylvanie. « La Roumanie est un pays sorti du communisme depuis peu de temps. C’est un territoire massacré par le totalitarisme où les routes traversent des paysages hallucinants de centrales, d’usines désertes et de bâtiments en béton toujours en construction depuis la chute de Ceausescu. Cela créé une atmosphère fantomatique qui rajoute au mystère propre de ce pays », raconte Gatlif. Un territoire spectral qui, outre l’illustration musicale, se veut très vite protagoniste à part entière. « C’est un paysage aux confins de la Moldavie, totalement fascinant ! Là-bas, tout n’est que glace, givre, brouillard et neige. (…) La Transylvanie me fascinait car c’est une terre à la confluence de la Russie, de la Hongrie et de la Roumanie où cohabitent plusieurs communautés. On y croise des Roms, des Hongrois, des Roumains, des Allemands, qui parlent plusieurs langues : j’étais très attaché à l’idée que le film se déroule dans une atmosphère métissée où les communautés se partagent le territoire pacifiquement et parlent une langue qui leur est propre ». Sans oublier ce langage universel qu’est la musique, devenu griffe de Tony Gatlif. Danse et transe seront également ici au rendez-vous. Une nouvelle BOF gitane ? Bien plus. Sachez que celle ci aura fait l’objet d’un long voyage de repérages au travers de toute la Transylvanie avant même le tournage du film. A l’arrivée fut composée et enregistrée par 80 musiciens une vraie partition originale. Le tout en collaboration avec Delphine Mantoulet (qui déjà avait travaillé sur Exils). « J’ai découvert des sonorités extraordinaires qui m’ont totalement possédé ! Mais, dans le même temps, je ne voulais surtout pas d’une musique ‘ethnique’ », confesse le réalisateur. « La musique irrigue tout le film ». De quoi parfaire cette quête d’absolu et, bien sûr, soigneusement nourrir nos trois comédiens-vedettes ! « Avec Tony, il y a rapidement une vision qui se dégage du tournage, on n'a pas besoin de script. Et puis, il y a cette musique omniprésente qui conte également une histoire. A tout moment, on ressent ce fil rouge », nous racontait d’ailleurs à ce titre, en mai dernier à Cannes, Birol Unel.
Rouge, à juste titre. Passions, quêtes, bouleversements, décadences... Odes à la féminité… La couleur fut vedette en cette 59è compétition officielle cannoise. Etonnamment féminin (surtout considéré la filmo de Tony Gatlif), Transylvania n’échappe naturellement pas à la règle. Certes, avec Asia Argento et Amira Casar en tête d’affiche, on ne pouvait s’attendre à un périple en demi-teinte. L’approche de Gatlif fut ainsi des plus investies. « Avant, j’écrivais plutôt des histoires d’hommes parce que je m’y projetais systématiquement. Avec Transylvania, pour la première fois j’ai eu le sentiment de filmer l’âme d’une femme à travers Asia Argento. J’ai filmé comme un homme amoureux qui part de l’âme pour ensuite dévoiler la beauté du visage».
La superbe Asia ? « Dans Transylvania, Asia ne se protège pas pendant le tournage, ni physiquement, ni psychologiquement. Elle donne tout », ajoute le réalisateur. « Elle s’expose dans le froid extrême sans se soucier de son visage. Elle se livre totalement, sans aucune retenue. J’ai ressenti sa participation comme un magnifique cadeau. Du coup, je me suis senti une incroyable responsabilité vis-à-vis d’elle. Asia possède une force rare que je n’ai jamais rencontrée que chez les gitanes ».
Forcément, à ce tableau des inconditionnelles marques d’admirations venues du cœur de Gatlif, Birol Unel et Amira Casar ne sont pas en reste.
Lui : « Je l’avais trouvé formidable dans Head On, mais je ne voulais pas qu’il joue de la même façon : il ne fallait pas qu’il soit violent, mais vulnérable. (…) Lui non plus ne s’est pas protégé pendant le film. C’est un homme qui ne se ment pas, un acteur entier : il est libre ». Elle : « La façon dont Amira a pris Marie à bras le corps était très impressionnante. (…) J’aime sa vitalité et son optimisme. Amira est une comédienne généreuse qui m’a fait confiance. Elle est allée au bout du personnage de Marie ». « Je me suis emparée du personnage de Marie par un phénomène d'intériorisation, de vampirisation », ajoutait la comédienne en conférence de presse cannoise. « Marie ressent le désir d'être l'autre, elle est en quelque sorte la béquille de Zingarina. Il y a une douleur dans ce personnage, une perte d'identité qui étaient intéressantes à restituer à l'écran. Entre Asia et moi, il y avait une relation extrêmement puissante, on nous appelait d'ailleurs les ‘Parallel Sisters’. Il y a des choses qui nous ont mises sur les mêmes rails de la vie. On avait l'impression qu'on se connaissait depuis toujours, comme s'il s'agissait d'une amitié antique. Tony a voulu happer cette ressemblance entre nous avec sa caméra ».
De précieux comédiens et, reconnaissons, un jeu d’une rare beauté, a fortiori en conditions extrêmes, dans tous les sens du terme. Rappelons que Tony Gatlif ne dirige jamais ses comédiens à partir de trames scénaristiques. Nobles performances ! A Amira Casar d’encenser son très remarquable metteur en scène : « Tony est un néo-réaliste païen avec qui on signe un pacte de confiance poétique. En tant qu'acteur, on a envie de s'abandonner à lui, on peut se lancer dans cette aventure les yeux bandés. Il amène avec lui une espèce de force, c'est lui qui nous apporte la lumière ».
Bienvenue au bout du monde, à bout de souffle, à bout de nerfs pour un périple en territoires glaciaux, déserts et pourtant bien brûlants de ferveurs. A l’image de ses peuples métissés. Une entière et jusqu’au-boutiste séance finale que l’on aurait bien savourée en compétition officielle.
Sabrina
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