Production: Filmalbatros, Rai Cinema
Réalisation: Marco Bellocchio
Scénario: Marco Bellocchio
Montage: Francesca M.Calvelli
Photo: Pasquale Mari
Musique: Riccardo Giagni
Durée: 102 mn
Sergio Castellito : Ernesto
Jacqueline Lustig : Irene
Chiara Conti : Diana
Alberto Mondini : Leonardo
Festivalcannes.org
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Le Prince de Hombourg (Cannes 97)
 
 

L'ora di religione (Le Sourire de ma mère)

Italie / 2002 / Sortie en salle n.c.
Sélection Officielle / Présenté le : 17.05.02

Ernesto ne va pas bien. Peintre reconnu, illustrateur de contes pour enfant, il vient de se séparer de sa femme Irène, tout en la voyant continuellement, afin de rendre visite à son fils, Leonardo, qu'il adore.
Il n'a pas résolu ses traumatismes passés. Il se voit sourire comme sa mère, une femme bête, comme il dit.
Mais cette femme est en passe d'être sanctifiée. Sa famille, dans son dos, préparait la canonisation de cette mère assassinée par l'un de ses fils.
Au même moment, Léonardo s'interroge beaucoup sur Dieu.

Marco Bellocchio sera le symbole du cinéma italien à Cannes cette année. L'an dernier, Moretti avec sa Chambre du fils remportait pourtant la Palme d'Or. Né en 39, il fut étudiant en philosophie à l'Université Catholique avant de s'inscrire au Centre Expérimental du Cinéma. Cela explique ses thèmes très portés sur l'Art, le mysticisme, ou encore l'histoire. Bellocchio est un fidèle du Festival. Il s'agit de son huitième film en sélection. Parmi eux, Le saut dans le vide (double prix d'interprétation pour Aimée et Piccoli), le sulfureux Diable au corps, et plus récemment, La Nourrice.
Son acteur principal, Sergio Castellito est lui aussi un habitué de la Croisette depuis Le Grand Bleu; on l'a vu ces derniers mois dans Va Savoir (Cannes 2001) et dans Concurrence Déloyale.
Notons aussi la présence de Riccardo Giagni pour la musique. Ce dernier travaille avec le Centre Pompidou, le MAC de Strasbourg, la section musique du Festival Adriaco Cinema (dirigé par Bellocchio).
Le film a reçu de très bonnes critiques en Italie, et a obtenu un succès d'estime auprès du public. Mais le Vatican l'a fortement attaqué. A cause de deux "blasphèmes", les censeurs religieux l'ont "condamné". Or, de nombreuses salles de cinéma dépendent de l'Eglise. Comme l'indique le film, le Pape est une conscience très forte de l'Italie, même la plus agnostique.
Sorti le 19 avril en Italie, le film a déjà enregistré 900 000 euros dans les caisses.

 

NOUS IRONS TOUS AU PARADIS

"- Comment Dieu contrôle-t'il 6 milliards de gens simultanément?"

Un film peut être porteur d'une promesse, d'un espoir. Et lorsque la fin interrompt notre expectative, la déception gâche le plaisir éprouvé. Le sourire de ma mère appartient à ces films trop métaphoriques où chaque image révèle du sens sans nous donner les codes de décryptage. Marco Bellocchio a hésité entre deux titres (L'heure de la religion, titre officiel italien, et Le sourire de ma mère, titre officiel français) comme il a hésité entre deux films. Parti d'une idée (captivante), il a développé un scénario par fragments et délivré un film incohérent, confus, et avorté.
Nous sommes plus dans le "devinatoire" que dans le "divinatoire". Etrange et sinueuse, l'histoire suit un personnage à la fois extérieur aux événements et situé au coeur du film. Ce que l'on croit être un film engagé, subversif, anti-clérical devient juste l'illustration des mécanismes de la cannonisation. Ce que l'on pense être une oeuvre policière, où le complot des uns se mêlent à la parano du héros plein d'égo, n'aboutit finalement qu'à une vague leçon de morale. Porté a priori par un suspens intriguant, le film de Bellocchio se cherche un thème, une histoire.
Pourtant, elle était sous ses yeux. La magnifique relation entre le père et le fils, soutenue par des questions sur Dieu, la religion, la responsabilité, forme des scènes intenses et attachantes. A cela s'ajoute quelques séquences suspendues, toutes très belles. Mais l'ensemble est parasité par des allégories inutiles et trop codées, des dialogues stériles entre hypocrites et moralistes, et un discours mal maîtrisé sur le fantasme du "père", qu'il soit celui de la nation ou d'une famille.
Le rythme est déséquilibré, tantôt musical, tantôt ennuyeux. Ni mystique, ni athée, Le sourire de ma mère aurait du s'appeler Le sourire du fils. Car c'est bien ce sourire ironique face à la mort, face aux autres, face à sa vie, qui le piège. Finalement, en faisant de son personnage un hésitant déterminé, Bellocchio nous fait croire, malgré le "sur-esthétisme" de son dernier opus, qu'il est passé à côté de son sujet.

  (C)Ecran Noir 1996-2002