Production: DreamWorks, Gravier Prod., Perdido
Réalisation: Woody Allen
Scénario: Woody Allen
Montage: Alisa Lepselter
Photo: Wedigo Von Schultzendorff
Musique: Bing Crosby, Barbara Carroll, Jackie Gleason, ...
Durée: 110 mn
Woody Allen: Val
Téa Leoni: Ellie
Treat Williams: Hal
George Hamilton: Ed
Tiffani Thiessen: Sharon Bates
Festivalcannes.org
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Hollywood Ending

USA / 2002 / Sortie en salle le 15 mai 2002
Hors Compétition/ Présenté le : 15.05.02
Palme des Palmes pour Woody Allen et son oeuvre.

Val est un cinéaste à Oscars (deux pour être exact) et se retrouve paumé au Canada à réaliser des pubs pour déodorants.
Son ex-femme, Ellie, désormais cadre executif californienne chez Galaxy Pictures, cherche à lui redonner sa chance, en usant de son pouvoir de persuasion vis-à-vis de Hal, le patron, et son fiancé.
Val, bien qu'il en veuille toujours à Ellie et que Hal soit son pire ennemi, accepte le challenge : réaliser un film à gros budgets avec New York en toile de fond.
Mais cet hypocondriaque devient aveugle juste avant le tournage. Son agent décide de simuler tout...

Woody Allen est sans aucun doute l'un des auteurs de comédie les plus reconnus du cinéma mondial. Ses films, semblables à des one-man show bavards, psychanalitiques, et égocentriques, ont trouvé, notamment en France, un écho considérable.
Il avait déjà présenté quelques films à Cannes : Manhattan, Broadway Danny Rose, La Rose pourpre du Caire, Hannah et ses soeurs, Radio days et NY Stories. Hollywood Ending permet, pour la première fois, la venue de cet immense auteur sur la Croisette.
"J'ai été souvent invité à Cannes. Il y a une sorte de lien affectif. Pour exprimer ma gratitude au public français, j'ai voulu faire un geste et remercier cette affection. Ce film était particulièrement adéquate pour ma venue". Il a ainsi braver l'appel au boycott lancé par un groupe de juifs américains. Et si à la fin de son film, il s'envole pour le pays des mangeurs d'escargots, il s'agit d'une "pure coïncidence".
Le film sort quelques mois à peine après Le sortilège du Scorpion de Jade. Aux USA, le filmm, rival de Spiderman ne devrait pas dépasser les 10 millions de $ de recettes, malgré l'appui de DreamWorks.
Il a enrôlé de nombreux nouveaux visages dans l'univers allénien (aliéné): George Hamilton, ancien Vampire de ces dames et partenaire régulier à la TV et au théâtre de Joan Collins; Téa Leoni, nomade et universitaire, a été une femme de choc dans Deep Impact, Family Man et Jurassic Park 3; Debra Messing est surtout connue pour son rôle de Grace dans Will & Grace, où elle coloue son appart avec son meilleur ami, gay. Elle jouait déjà dans Celebrity. Autre célébrité télévisuelle, la belle (poitrine) Tiffani Thiessen, remarquée dans Sauvez par le gong et Beverly Hills 90210. Treat Williams nous revient de loin : Hair, 1941 et Le Prince de New York. Dans le rôle de l'agent, Allen a été cherché Mark Rydell, réalisateur de The Rose, La maison du lac et producteur de Jeremiah Johnson.
Le film est Hors-compétition. Mais Woody Allen constitue l'un des apéritifs les plus sucrés et les plus singuliers qu'un Festival puisse offrir.

 

POUR UNE BEGIN AVEC CANNES

"- As-tu déjà été au Canada? J'ai compris pourquoi le crime y était absent!"

Même un Woody Allen mineur restera un plaisir supérieur à la plupart des films produits. Cela valait bien l'Ouverture d'un Festival comme Cannes. D'autant que le sujet s'y prête. Cette satire d'Hollywood n'est pas la meilleure du genre; récemment des films comme Bowfinger ont été plus justes et plus saignants. Le scénario bat de l'aile : trop léger, trop simpliste, pas assez cynique. Si l'on compare à Manhattan (son premier film cannois) ou Annie Hall (son seul Oscarisé), il manque cette subtilité, ce sens nuancé des contradictions humaines, cette névrose urbaine apparente. Tout cela, avec le temps, est devenu caricature, burlesque, et clownerie. Allen se mute en Charlot ou Keaton, un personnage de comédie qui se suffit à lui-même, une sorte de potache qui supporte tout le film.
Si le script ne va jamais au fond des choses - survolant les débats (cinéma d'auteur, cinéma commercial, vidéo...), les dialogues restent toujours aussi hilarants et absurdes ("Son brushing nourrirait une famille de 5 personnes","le meilleur moment dans la masturbation, c'est après. On peut se faire un calin."). On sent sa hargne - autobiographique - à l'égard de cette industrie fast-food, de cette dégénerescence culturelle, et regretter ainsi le temps d'Hitchcock, de l'ouverture aux autres cultures.
Mais, hélas, on se lasse. Le personnage de Téa Leoni, aussi belle soit-elle, ressemble trop à celui d'Helen Hunt. La traditionnelle femme fatale n'est plus Charlize Theron, mais Tiffani Thiessen. Allen, tout en nervosité, semble un peu vieux pour le romantisme sensuel. Après l'hypnose endormante du Scorpion de jade, nous voici plongé dans le noir avec un cinéaste aveugle. Rien d'hallucinant. La répétition ne fait qu'accentuer le manque d'inspiration de ce brillant auteur, désormais peut-être trop productif.
Le style visuel est certainement plus soigné, les comédiens tous excellent, et même les séquences parfois très drôles (essentiellement quand elles reposent sur un comique de situation), mais Woody Allen ne fait que compléter son oeuvre par petites touches; cette oeuvre est une illustration colorée de New York, un autoportrait du cinéaste, et sa vision du monde. Dans cette vision, avec ironie, il salue les français de voir encore le cinéma comme un Art et non une industrie : "Thanks God, French exist!". En effet, ce lien affectif avec Allen rend la critique toujours plus indulgente. A défaut de grand film, saluons l'auteur.

  (C)Ecran Noir 1996-2002