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Baccalaureat (Bacalaureat)
Sélection officielle - Compétition
/ sortie le 2016
UNE SÉPARATION
«- Elle devrait tout gâcher à cause de cet accident ? »
A l’instar de Cristian Puiu avec Sieranevada, Cristian Mungiu a choisi une chronique familiale sur fond de critique de la Roumanie pour son Baccalauréat. On y reconnaît les mêmes styles de réalisation - plans séquences (notamment dans une voiture, filmé à l’arrière), plans fixes, décors de banlieue, image terne – et d’écriture – discussions autour d’un système, disputes conjugales, relations tendues entre les générations. Cette similitude est troublante et nous conduirait à dire qu’il y a une « école » roumaine, et aucun des maîtres contemporains qui se distinguent vraiment.
Mais là où Puiu préférait s’enfermer dans un appartement et observer la classe moyenne roumaine débattant de tout et de rien, Mungiu a une ambition cinématographique plus proche du thriller social et familial. A l’instar de l’héroïne des Dardenne, La fille inconnue, on suit un médecin qui décide d’enquêter sur une agression. Car, dans son confort bourgeois où tout semble couler de source, des petits signes avant-coureurs annoncent la désintégration de sa vie familiale. Toute la construction patiemment bâtie au fil des ans – un métier, une épouse, une fille douée – et son esprit d’intégrité vont s’écrouler rapidement dès qu’une pierre va briser une fenêtre de son domicile, un petit matin. Il pourchasse alors un "agresseur" qu'il ne trouvera jamais.
Mungiu prend un soin particulier à nuancer tous les caractères. Seules les femmes semblent épargnées : l’épouse dépressive, la fille victime, la maîtresse patiente. Elles étouffent avec cet homme – mari, père, amant – indécis pour lui-même alors qu’il décide à leur place.
Progressivement, tout va imploser. Le médecin va perdre de son autorité et, lentement, abandonner son assurance, pour finalement, prendre conscience de ses peurs. Impuissant au déroulement des choses, qui lui échappent, il constate, parallèlement, que la Roumanie n’a pas changé depuis les années 1990, que les erreurs n’ont pas été apprises.
C’est là où le cinéaste alourdit son propos à vouloir faire un film politique là où l’intime suffisait. En insistant trop sur la pourriture génétiquement ancrée dans les relations des uns et des autres, il se perd un peu dans des séquences répétitives. Magouilles, pistons, entraide, serviabilité, corruption, mensonges : tout y passe. Certes, il veut prouver l’échec d’une génération. La Roumanie n’a pas changé et l’honnêteté ne paye pas. Ici, l’enjeu dramatique se créé, entre une fille qui conserve les valeurs que ses parents lui ont inculqué et son père, prêt à les trahir en se compromettant pour sa fille. Une fille peu reconnaissante envers les sacrifices de son père et un père prêt à s’endetter en reconnaissances pour le futur de sa progéniture.
Pourtant, Baccalauréat n’est pas complètement pessimiste (et d’ailleurs s’achève sur une image lumineuse inattendue) et le cinéaste veut nous faire croire que la jeunesse peut réorienter le pays dans la bonne direction, loin des « combinazione ». Toujours un peu moraliste, Mungiu livre une œuvre théorisant que la fin ne justifie pas les moyens. Il vante l’individualisme d’une nouvelle génération prête à suivre sa propre voie, toujours meilleure que celle de l’ancienne qui ressemble davantage à une association de tricheurs. Tandis que la fille s’émancipe, y compris physiquement en abandonnant son allure de jeune étudiante modèle, le père s’enlise dans un enfer intérieur, sans domicile ni pouvoir. Tout s’est effondré pour lui.
Baccalauréat porte bien son titre. La fille réussit son examen, couper le cordon, tandis que le père le rate. A l’image de leur pays : ces parents donneurs de leçons n’ont finalement que ce qu’ils mériteraient.
Cependant, malgré toute cette profusion de sentiments et de thèmes, malgré l’intelligence du scénario et la qualité de l’interprétation, le film ne parvient pas à nous passionner, ni nous bouleverser. La copie est trop appliquée, avec un air de déjà vu.
vincy
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