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Nahid
Certain Regard
Iran / sortie le 24.02.2016
FEMME SOUS INFLUENCES
Pour son premier film, l’iranienne Ida Panahandeh signe un portrait d’une femme courageuse et hésitante, partagée entre ses devoirs, ses aspirations et oppressée de toutes parts. Nahid, nom du personnage incarn� superbement par Sareh Bayat, est le parcours du combattant d’une femme qui lutte contre un système domin� par les hommes et qui doit se soumettre � leurs dogmes et préjugés. Ancr� dans la classe moyenne, fond� sur une affaire de mœurs (séparation, mariage provisoire, garde d’enfant), le film flirte avec les thèmes d’Asghar Farhadi. Mais il s’en éloigne au fil du récit, évacuant tout point de vue moraliste.
Dans Nahid, l’histoire flotte au gr� des courants, se heurtant � de sérieuses embûches, et notamment la tyrannie de mâles qui ne trouvent leur courage que dans la force et dans le pouvoir que leur confère l’idéologie du pays. Même le fils vire mal� Il n’y a bien que l’amant � secret � qui échappe � ce jugement. Les femmes s’en sortent un peu mieux, entre la peur de se rebeller et la nécessit� de s’entraider.
Par conséquent, Nahid, singulière parmi tous, se détache naturellement pour devenir une héroïne, résistante et victime � la fois. Les larmes sont parfois amères. Les sourires sont rares. Mais lorsqu’elle est amoureuse la lumière jaillit sur son visage. Le piège qui paraît se refermer sur elle nous fait craindre le pire. Et elle n’est pas exempte de défauts (comme cette folie dépensière, cette incapacit� � exprimer ses sentiments, cet orgueil qui l’empêche de prendre la bonne décision). Femme coincée dans ses mensonges, femmes piégée par son environnement, femme en quête de libert� et d’indépendance : tout cela contribue � renforcer notre empathie vis-�-vis d’elle, sans que la cinéaste ait besoin de trop d’effets. Nul pathos ici. Juste la réalit� de la condition de la femme en Iran (bouleversante) o� la garde d’un enfant ne peut pas être confiée � une mère célibataire et o� l’on peut signer des mariages en CDD (pour cohabiter avec un amant).
Car la réalisatrice souligne, � travers ce drame romantique au bord de l’eau (par temps de pluie), la montagne d’hypocrisies et d’absurdités qui pèse sur les femmes, pour mieux justifier une domination patriarcale d’un autre temps.
Mère Courage � la Brecht, Nahid n’a rien d’aimable ou de respectable : elle est juste normale, avec ses failles, ses blessures, ses erreurs. Il n’y a ici aucune facilit�. Le film lui-même rejette tout confort l’entraînant d’une prison � l’autre, toujours sous la menace d’un péril, incapable de prendre la bouée pour se sauver du naufrage dans lequel elle se débat.
Sous son allure de simple drame, le film est engag� ; malgr� son histoire mélancolique et romantique, la duret� sociale est ce que l’on retient ; derrière ce tableau social, on admire le courage cinématographique d’avoir os� montrer une femme libre en Iran.
vincy
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