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Sils Maria
Sélection officielle - Compétition
France
L'HEURE D'HIVER
"Je croyais qu'on détestait internet."
Le cinéma aime parler de lui-même, et a besoin de se regarder dans un miroir pour observer ce qu'il fut, ce qu'il est et ce qu'il devient. Dans Sils Maria se mêlent ainsi un portrait ambivalent du milieu artistique et une réflexion intense sur le temps qui passe et qui nous change. Comme un Map to the stars français, en plus introspectif, et qui porterait sur lui-même un regard à la fois lucide et cruel.
Il y ainsi le microcosme artistique en lui-même, dans lequel on sent que l'héroïne ne se reconnaît plus : elle ignore tout de la génération montante qui est en train de la pousser hors des projecteurs et vit dans le souvenir de ce qu'elle fut plus que dans la perspective d'un futur où elle aurait encore sa place. Elle n'a que faire des scandales et des polémiques qui entourent les nouvelles
stars, dont elle découvre les frasques avec perplexité sur son téléphone ou sa tablette. Pour elle, seule l'œuvre (théâtrale ou cinématographique) compte.
Et puis il y a le temps qui passe, symbolisé notamment par la construction du film en trois parties très tranchées. Dans la première,
Maria est la star par excellence, belle et acclamée. Dans la deuxième, elle est la doyenne qui reçoit l'hommage des plus jeunes. Dans l'épilogue, elle est en bout de course. Pour signifier l'ellipse temporelle (mais aussi l'évolution psychologique du personnage entre les différents moments), Olivier Assayas a recours à un effet visuel simple : raccourcir les cheveux de son héroïne et la dépouiller de tout artifice. Plus le film progresse plus elle semble ainsi se faner et s'étioler sous nos yeux.
Si la démonstration a des fulgurances, notamment dans les scènes de répétition intenses entre Kristen Stewart et Juliette Binoche (où la frontière entre réalité et fiction devient poreuse), elle souffre aussi par moments d'un certain didactisme, et fait l'effet d'une tentative de théoriser (maladroitement) ce qui est de l'ordre de l'intuition et du non-dit. Derrière des répliques comme "un texte varie selon le point de vue" ou "on est la somme de ses expériences", on croit entendre la propre voix d'Olivier Assayas, en pleine réflexion sur son métier.
Cela ne manque pas d'intérêt, et induit une double lecture du film. Toutefois, il y a un tel déséquilibre entre les 3 parties, un tel manque de consistance dans la narration, que l'on a plus l'impression d'assister à un exercice de style honnête et un peu scolaire, qu'à une réflexion profonde sur les rapports de l'être humain au temps et à l'art.
MpM
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