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Les Saphirs (The Sapphires)
Sélection officielle - Séances spéciales
/ sortie le 08.08.2012
QUATRE FILLES DANS LE VENT
"- 90% des chansons qu'on entend sont de la merde. 10% des bonnes chansons sont de la Soul."
Les Aborigènes d'Australie au cinéma s'intègrent de plus en plus au cinéma : Jedda (1955), La randonnée (1971), The Chant of Jimmie Blacksmith (1976), Aux frontières de la ville (1986), Thomson of Arnhem Land (2000), The Tracker (2002), Le Chemin de la liberté (2002), Australia, Samson et Delilah (2008) et n'oublions pas le très populaire Crocodile Dundee en 1986. Les Saphirs rappelle d'emblée que cette insertion dans la société australienne est récente, parallèle à aux lois émancipatrices des afro-américains des années 60. Peuple opprimé, brimé, les Aborigènes sont enfin réhabilités sur le grand écran, et, surtout, en tant que comédiens ou cinéastes, ils contribuent à la diversité et la richesse artistique de leur pays.
Si Les Saphirs aurait pu être un "feel good movie" d'Amérindiens ou d'afro-américains aux Etats-Unis ou un conte aux temps de l'Apartheid sud-africain, une lutte universelle pour l'égalité vue d'une minorité, le film a aussi épousé cet aspect assez formaté du cinéma américain : un "storytelling" un peu forcé avec happy end au bout du chemin. Inspiré d'une histoire vraie, très remaniée, le film préfère s'éloigner d'une réalité documentaire pour devenir une pure fiction de divertissement avec tous les ingrédients nécessaires : musique, aventure, romanesque, ... ils ne manquent plus que les paysages en cinémascope. Un cinéma à l'ancienne, en matière de narration, que ne modernise pas réellement la mise en scène, sans faux pas mais sans surprise non plus. Le film aurait pu être réalisé il y a dix ans ou par un autre cinéaste que nous n'aurions pas vu la différence.
Si le contexte est assez binaire (un peuple exclu dans une société ultra-conservatrice et raciste, un seul "blanc" faisant exception), les personnages le sont moins. Les quatre filles sont réellement attachantes, même si leurs caractères aussi complémentaires que différents, semblent trop écrits pour le cinéma. Mais le quatuor ne manque pas de charme, et Gail, l'aînée du groupe (excellente Deborah Mailman), donne du punch et une sensibilité salvatrice à l'ensemble.
Une fois au Vietnam, les imbroglios se multiplient. Au milieu de soldats épilés à tablettes de chocolat, les péripéties et les drames personnels (du passé et du présent) surgissent. Aux frontières du roman Harlequin, les romances se tissent. La partie musicale est balayée en quelques extraits de chansons. Le film s'autorise quand même une séquence épique, la plus intéressante, celle qui flirte avec le cinéma d'antan : concert glorieux devant une foule de militaires, division du groupe, histoire d'amour qui se noue et bombes qui viennent tout saccager et éventuellement changer les destins... Si tout cela manque de réalisme, ça ne manque pas de romantisme.
Jolie fable (un comble pour une histoire vraie, mais qui n'a pas enrobé ses souvenirs de papier bonbon?), avec ces moments creux et ses grands sentiments, Les Saphirs intrigue davantage pour son combat politique au milieu d'une zone de combats (la mort de Martin Luther King est à ce titre révélatrice de la mondialisation des causes), hélas esquissé grossièrement au profit des conflits "familiaux" et familiers. Surtout, le film ne passionne que pour ce duo improbable et pourtant très crédible entre un "loser" irlandais aux allures d'ours mal léché et une battante aborigène au tempérament de maman ourse. Leurs batailles et leurs attirances créent les meilleurs moments du film, entre amour impossible et comédie burlesque.
Mais, à l'instar des chansons des Saphirs, uniquement des reprises, ce joyeux drame ne semble n'être rien d'autre qu'une énième version d'une histoire qu'on connaît déjà par coeur. Du coeur il y en a, mais il manque un peu d'âme, cette fameuse Soul qui les rendent libres.
vincy
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