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Carlos, le film
Sélection officielle - Hors compétition
France / sortie le 07.07.2010
ARRETE-MOI SI TU PEUX
« - Arafat est un traître, il est prêt à tous les compromis.»
Carlos, le film. Ne « jugeons » que le film. Oublions qu’il s’agit avant tout d’un feuilleton télévisuel monté pour l’exportation cinématographique. Olivier Assayas a pensé sa fresque dans une dimension qui sied bien au grand écran. Il retrouve sa caméra vive de Clean et s’inspire d’œuvres comme le Che de Soderbergh, avec talent. Si Assayas n’est pas, de loin, un cinéaste trippant, son Carlos l’est assurément.
Fiction plus que documentaire, portrait d’une époque d’avantage que biopic, le film est avant tout une fuite en avant qui s’essouffle comme le personnage s’épuise vainement à conserver sa réputation.
Cela contraint le film à un périlleux équilibre, en matière de rythme comme de forme. Presque impulsif et voyageur dans sa première partie – la construction du terroriste – il se transforme en huis-clos à suspens dans son deuxième chapitre – la prise d’otages ratée des membres de l’Opep. Puis la désagrégation se fait progressivement, avec des plans plus stables, un montage plus ralenti, un ennui qui correspond à l’oisiveté du personnage. Clairement Assayas , comme Soderbergh, a eut de la difficulté à harmoniser deux vies. Celle de l’ascension et celle de la décadence, l’action trépidante (et ses exploits « glorieux ») et la soumission à des aléas politiques qui contraignent ces « héros » à attendre leur destin fatal.
Assayas a su trouver en Edgar Ramirez un comédien exceptionnel dans tous les registres (et dans toutes les langues). Charismatique, opportuniste, intelligent, antisioniste mais pas antisémite, arrogant, individualiste, passionné, ce « caméléon » n’est jamais antipathique ou sympathique, mais exprime justement les nuances d’un « salaud » petit-bourgeois qui se la joue rebelle, qui croit en sa cause, jusqu’au moment où l’on s’aperçoit qu’il ne se bat que pour conserver son statut, et sans aucun sens politique. Un con, finalement.
Le passage des années 70, trépidantes, aux années 80/90, indifférentes, est sans doute magnifique à l’écriture, mais passe mal à l’écran. Cette rupture de ton est trop marquée pour nous hypnotiser jusqu’au bout. On reste nostalgique des débuts du film, rock et énergiques, mêlant images d’archives et reconstitution soignée.
D’autant qu’on repère aisément quelques erreurs. Des soucis de focales qui empêchent de nombreux plans d’être nets. Un aéroport d’Alger qui est le même que celui de Tripoli, Beyrouth ou Khartoum. Des phrases qui se répètent comme dans les mauvais blockbusters hollywoodiens (« Les choses ont changé »). Des amis et compagnons qui n’évoluent pas physiquement malgré les années qui passent. Une multiplication des fondus au noir, un peu incohérente parfois. Mais le film ne manque pas de panache.
Paris, Beyrouth, Vienne, Berlin, Alger, Damas, Karthoum, Londres… avec en toile de fond le Chili, le Proche Orient, Bagdad, Munich, Cuba. Malgré ce tour du monde sur trois décennies, Assayas garde son style, filmant les visages et les corps, tous ces gestes qui ont de l’importance. La scène la plus marquante restera sans doute celle où Carlos sort de son bain, se regarde nu dans le miroir, se caresse sa queue, et vient se coller à la fenêtre comme pour lui faire l’amour. Un narcissique. Tout est là.
vincy
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