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(C) 96-01 Ecran Noir

Avalon
Japon
Sélection Officielle - Hors compétition
Projection: 19 Mai 2001
Sortie en salle : 27 mars 2001

Production : Deiz
Réalisation : Mamoru Oshii (Ghost in the shell)
Scénario : Kazunori Ito
Montage : Hiroshi Okuda
Photo : Grzegorz Kedzierski
Décors : Takashi Watabe
Costumes : Magdalena Testawska
Son : Kazuhiro Wakabayashi - Randy Thom
Musique : Kenji Kawai
Durée : 1h46
Rhys Ifans (Puff)
Ash : Malgorzata Foremniak
Le maître du jeu : Wladyslaw Kowalski
Murphy : Jerzy Gudejko
Bishop : Dariusz Biskupski
Stunner : Bartek Swiderski
 
Paumés dans un avenir offrant peu de perspectives, des joueurs se livrent à des joutes virtuelles pour améliorer leur ordinaire. A la recherche d'un graal hypothétique, clé de délivrance de leur désespoir, certains se sont grillés le cerveau en croyant avoir trouvé l'issue vers un ailleurs meilleur. Ash, jeune femme solitaire, est fermement décidée à franchir tous les stades du jeu afin d'en découvrir l'énigme finale…
 
 
C'est en passant de nombreuses heures à s'escrimer sur un jeu vidéo que le réalisateur de Ghost in the shell eut l'idée de développer une histoire liée aux mondes virtuels et à la perte de repère avec la réalité que ceux ci sont suceptibles d'entrainer.
En tournant ce film sur une courte période en Pologne et avec une équipe essentiellement originaire de ce pays, Mamoru Oshii souhaitait retrouver une certaine authenticité propre au cinéma local qu'il affectionne particulièrement. La post production fut en revanche effectuée au Japon et inclua de longues séances de retouches graphiques et d'étalonnage sur des stations numériques dernier cri.
Prévu à l'origine pour un homme, le rôle principal fut finalement attribué à la blonde Malgorzata Foremniak, actrice très populaire en Pologne, qui dut se coiffer d'une perruque corbeau pour se fondre dans l'idéal féminin du réalisateur.
 
JEUX DE GUERRE

Avalon, verger de pommes

S'il est des films générationels, Avalon se place assurément comme l'un d'entre eux. Mixage de culture technoïde et de mangas, les ingrédients réunis dans ce long métrage ne peuvent qu'éveiller l'intérêt des adeptes du paddle et des mondes virtuels. Si le cinéma dépeint une réalité fictive mais censée se matérialiser sur l'écran et dans l'esprit du spectateur, Avalon se donne comme mission hautement ambitieuse d'aller plus loin puisque la réalité même de l'univers qu'il décrit n'est qu'apparent dans le contexte de son histoire.
Film pelure d'oignons, dans lequel le concret semble repoussé un peu plus loin à chaque fin de niveau. Le monde du joueur se résume à une fuite en avant vers une révélation incertaine. La vérité de chacun semble se situer au delà de son ennui, de l'oubli de son quotidien grisâtre, du dépassement de soi dans l'imaginaire. L'évolution de l'humanité trouverait dans le virtuel un nouveau prolongement sensitif, dans lequel sa conscience peut se développer sans les limites contraignantes de son corps. Aujourd'hui on peut y voir aussi un simple passe temps défoulatoire et vaguement abrutissant pour les neurones.
Mamoru Oshii n'apporte que peu d'eau au moulin de la réflexion cyberpunk tant son œuvre est pesante et tristement poseuse. Car absorbé à concrétiser une sorte de manifeste esthétique, qu'il semble vouloir maîtriser dans le moindre détail de façon obsessionnelle, le réalisateur japonais néglige totalement les aspects qui font que l'intéraction entre le spectateur et l'histoire puisse se produire. Sa plus grande erreur reste sans doute son incapacité à rendre attachants ses personnages, déshumanisés certes comme l'exige le récit, mais dont la froideur et le manque de réactions font qu'ils ne parviennent pas à dégager un engouement véritable (que certains acteurs sont gauches et mal dirigés ! !). On restera donc loin de 1984, Dark city, on ne parlera même pas de Brazil, dans lesquels le facteur humain parvenait à subsister face à la machine broyeuse du système. Oshii adopte un traitement radicalement clinique, distancié avec l'être humain qu'il ne parvient pas à équilibrer par une mise en scène fluide. Celle ci très contemplative se résume à un collage graphique expérimental qui s'il figure la logique de confection numérique d'un jeu vidéo, ne fait aussi que renforcer l'ésotérisme de l'ensemble. Parti pris de l'auteur quand tu nous tiens… Le problème demeure qu'en absence d'attachement aux protagonistes, de passions et d'enjeux dans l'intrigue, il est très facile de perdre tout intérêt pour le dénouement.
Le parallèle entre le régime communiste du block soviétique période rideau de fer est assez évident (et confirme la fascination mêlée de répulsion qu'entretient Oshii pour les régimes totalitaires déjà au centre de Jin Roh). Mais cette histoire de joueurs s'immergeant dans une simulation meurtière d'une guerre de fiction afin de gagner de quoi augmenter leur pouvoir d'achat, tout en rêvant d'atteindre le nirvana capitaliste taggé d'un sigle Coca cola , reste un peu simpliste dans sa représentation. Tout est tellement théâtralisé que la parabole en devient des plus lourdes.

Sous ses airs de fable peu accessible, Avalon se révèle être surtout un film maladroit dans son élaboration minutieuse. Surfant sur des niveaux de perception spectraux, le metteur en scène a perdu le corps de son sujet et s'est retrouvé dans l'impossibilité de lui donner vie, un bon plasticien ne faisant pas nécessairement un bon réalisateur. Les affamés de consoles y trouveront peut être de quoi fantasmer malgré tout…

PETSSSsss-