|
Critique: Tous les Hommes sont mortels
L'enfer serait-ce les autres ou soi-même. Où commence la rivalité, où finit l'orgueil?
face à cette fuite en avant, ce "direct au but" aussi vain qu'existentiel, Patrice Chéreau cherche une fois de plus à osculter les douleurs, les frayeurs, les petits bonheurs des gens. Faut-il souffrir pour vivre? Détruire pour se sentir sexister? Pour ne pas mourir?!
Car la mort rode; le mort erre.
Il semble même que Chéreau filme le présent pour égarer l'avenir (fin inéluctable) et effacer le passé (parfois inaceeptable).
Des instants qui peuvent être magnifiques dans ce périlleux exercice d'équilibriste.
Comme ce duel entre un blasé et une désespérée (Trintignant, Blanc), ou cette femme qui déshabille du regard l'identité de Viviane (Bruni-Tedeschi, Pérez), ou encore ce solo de Trintignant dans la cave...Tout ici sonne juste (acteurs, dialogues) avec un rythme maîtrisé. Symbiose titale: la visite du cimetière enrobée par le son de Björk.
Là les hommes sont blessés, les femmes meurtries. L'amour carrément anéanti, jamais avoué.
Hélas Chéreau, parfois, en fait trop et fait tourner la sauce. On frôle l'hystérie puérile la crise de nerfs ou encore le mal de voyager. Des images trop mouvants qui donnent le tournis. On étouffe.
La scène racoleuse de Viviane nue, malheureux écho à La Reine Margot; le cliché de la réconciliation (nuit magique...); la bagarre dans le salon, dévastant futilement les personnages; ou encore la séropositivité de Bruno, qui n'apporte rien.
La principale critique concerne surtout le flou de certains personanges, dont les rapports avec le défunt demeurent mal définis.
Si Chéreau s'éparpille et surcharge, flamboyant ce qui aurait pu être simplement romanesque, il n'empêche qu'il a réussi un film audacieux, plein de parti pris, pas tellement gonflé, mais qui dérangera certainement.
Une oeuvre qui échappe à nos certitudes et nous file entre les oreilles: une réponse à l'ennui. Ou son reflet.
Il y a ces musiques (bof conseillée), ces images si travaillées et ce générique panoramique et vertigineux en final.
Inspiré. Singulier. Irrégulier. Enervant, fatalement.
On peut déjà imaginer ceux qui vont aimer. Qui le prendront, ce train.
Et puis il y a ceux que cela fera bailler, choquer, déboussoler...
Chéreau a peut-être voulu trop montrer, trop donner: mais justement ce sont les défauts de ceux qui aiment trop.
|
|